Suite au succès retentissant de sa collaboration avec Omega MoonSwatch, le Swatch Group a récemment annoncé la création de sa prochaine montre, la Swatch x Blancpain Scuba Fifty Fathoms, également connue sous le nom de « Scuba Fifty », qui sera lancée ce week-end.
Cette nouvelle collection tire son nom des plongeuses Scuba des années 90 de Swatch et de la gamme de montres de plongée Fifty Fathoms de Blancpain. Elle s’inspire du garde-temps de la marque de luxe qui a posé les jalons des montres de plongée analogiques telles que nous les connaissons.
La Fifty Fathoms originale a été développée en collaboration avec des plongeurs de combat français qui avaient besoin d’une montre-bracelet sous-marine résistante et fiable. C’est ainsi qu’a été créée une pièce dotée d’un cadran lumineux, d’une construction étanche innovante et d’une lunette tournante verrouillable. La Submariner de Rolex, développée la même année, a adopté la même approche, mais n’a été commercialisée que l’année suivante.
Les montres Scuba Fifty Fathoms, d’une valeur de 390€, sont toutes étanches jusqu’à une profondeur de 91 mètres, soit 300 pieds (exactement 50 brasses, naturellement). Elles arborent les couleurs vives de la collection MoonSwatch et sont fabriquées à partir du matériau Bioplastic de Swatch pour les boîtiers. Toutefois, elles se distinguent par leurs composants internes : tandis que le chronographe MoonSwatch est équipé d’un mécanisme électronique à quartz, la Scuba Fifty Fathoms est dotée d’un mouvement automatique à remontage automatique issu de la ligne innovante Sistem51 de Swatch. Blancpain, acteur clé du renouveau de l’horlogerie suisse dans les années 1980 et 1990, est l’une des rares marques suisses à n’avoir jamais produit de montre-bracelet à quartz, préférant se consacrer exclusivement à l’horlogerie mécanique. Cette philosophie est maintenue même lorsqu’il s’agit d’une montre Swatch.
Construction de la marque Blancpain
La MoonSwatch a connu un succès retentissant pour Swatch, tant du point de vue de la marque que financier. Après avoir écoulé plus d’un million de montres en 2022, le Swatch Group a annoncé dans ses rapports annuels un bénéfice d’exploitation de 1,34 milliard de dollars, les ventes de MoonSwatch pouvant représenter jusqu’à 20 % du bénéfice du groupe. Selon Oliver Muller, consultant en industrie, dont l’entreprise LuxeConsult produit une étude annuelle de l’industrie horlogère avec la banque d’investissement Morgan Stanley, « cela a changé le destin de Swatch. Elle est redevenue rentable. Elle gagne à nouveau de l’argent, ce qu’elle n’avait pas fait depuis au moins une décennie ».
Cependant, contrairement aux 11 itérations de la MoonSwatch (sans compter les versions Moonshine Gold plus tardives), la collaboration entre Swatch et Blancpain comprendra cinq montres, chacune nommée d’après l’un des océans du monde.
Les modèles vert Indian, bleu Atlantic et jaune Pacific font référence à des versions plus modernes de la Fifty Fathoms, tandis que les modèles rouge Arctic et blanc Antarctic renvoient à des versions renommées et très rares commandées à des fins militaires dans les années 1960. Le modèle Arctic s’inspire de la Fifty Fathoms dite « No Rad », reconnaissable à un marquage bien visible sur le cadran indiquant l’absence de matériaux radioactifs dans les marquages luminescents de la montre, la dangerosité du radium, traditionnellement utilisé, n’étant apparue que récemment. Quant à la montre Antarctic, elle fait référence aux modèles « Mil-Spec » (spécification militaire) fabriqués pour l’armée américaine, avec un indicateur ésotérique sur le cadran pour la pénétration de l’humidité.
Inspiré par les limaces de mer !
Gregory Kissling, responsable du développement de la MoonSwatch chez Omega et chef de produit, a affirmé que les couleurs de la Scuba Fifty Fathoms ne sont pas seulement des teintes biocéramiques inédites, mais qu’elles sont également inspirées de nudibranches, des limaces de mer originaires de l’océan en question.
Il existe des milliers d’espèces de nudibranches dans les océans du monde entier. Ainsi, Swatch et Blancpain ont décidé de sélectionner cinq variétés colorées de mollusques marins pour inspirer la teinte de leurs nouvelles montres. Cette initiative s’inscrit dans l’engagement environnemental de Blancpain envers les océans et dans la continuité de l’esthétique lumineuse de la MoonSwatch.
Selon Oliver Muller, directeur de LuxeConsult, Blancpain se distingue considérablement d’Omega. Moins connue, elle se spécialise dans l’horlogerie haut de gamme et complexe, avec une production et une présence de marque bien moindres que celles d’Omega. Bien que la Fifty Fathoms soit un produit culte pour les amateurs de montres, l’activité principale de Blancpain est la fabrication de montres en métaux précieux rares, qui se vendent bien sur les marchés asiatiques.
Monsieur Muller déclare que, bien que la Fifty Fathoms soit un produit renommé, elle ne peut être comparée à l’Omega Speedmaster. Il ajoute qu’un autre problème réside dans le fait que Blancpain n’a pas réussi à développer une version unique et emblématique de la Fifty Fathoms, qui apparaît aujourd’hui dans de multiples itérations de luxe. Cette situation nuit au profil général de Blancpain et rend la marque moins visible pour la jeune génération. En effet, la génération Z n’est pas suffisamment informée de l’existence de la marque Blancpain. Il est donc nécessaire de donner un nouvel élan à cette marque dont l’image est considérée comme poussiéreuse.
Cependant, si l’on prend en compte le nombre de marques appartenant au Swatch Group, telles que Tissot et Hamilton, pourquoi Nick Hayek choisirait-il de donner à Blancpain le même coup de pouce commercial qu’à Omega (les ventes de la Speedmaster Moonwatch, dont le prix de vente avoisine les 7000 dollars, ont augmenté de plus de 50 % dans les magasins Omega) après la première collaboration entre Swatch et Blancpain, qui a fait sensation sur Internet et perturbé l’opinion publique ? La réponse est double. Tout d’abord, il semble que Blancpain ait souhaité se démarquer davantage que les marques internes concurrentes. Deuxièmement, un prototype Swatch x Blancpain avait déjà été réalisé.
Contrairement aux réserves initiales de Raynald Aeschlimann, PDG d’Omega, lorsque Hayek a proposé la MoonSwatch pour la première fois, Marc Hayek, PDG de Blancpain et neveu de Nick, était apparemment déterminé à être le prochain sur la liste. De plus, Marc Hayek a non seulement eu l’avantage de constater à quel point une telle collaboration serait bénéfique après le succès inégalé de la MoonSwatch, mais comme WIRED l’a révélé en exclusivité en juillet 2022, le groupe avait déjà produit un prototype approximatif d’une version Swatch d’une Blancpain.
Prototype initial
Au cours des débuts très confidentiels du projet Galileo, nom de code donné au projet interne dont seuls quelques membres du Swatch Group étaient informés, une Speedmaster et une Fifty Fathoms en biocéramique ont été produites pour l’inspection de Nick Hayek, ainsi qu’une version de la montre de plongée d’Omega, la Seamaster. Étant donné la reconnaissance publique de la marque liée à Bond et la frénésie alimentaire qui s’en est suivie, sans oublier le statut singulièrement légendaire de la Moonwatch d’Omega, il a été très judicieusement décidé qu’Omega serait la marque de lancement de la collaboration. Toutefois, l’option d’autres collaborations a manifestement été intégrée au projet et, après la MoonWatch, la Fifty Fathoms de Blancpain est la prochaine prétendante évidente.
Un autre facteur à prendre en compte est celui des anniversaires. Non seulement Blancpain célèbre actuellement le 70e anniversaire de sa montre de plongée avec une série d’éditions spéciales, mais cette année marque également le 10e anniversaire du mouvement automatique innovant Sistem51 de Swatch.
Swatch a été fondée en 1983 et a acquis une renommée en produisant des montres en plastique colorées et à la mode. En 2006, l’entreprise a célébré la production de sa 333 millionième Swatch. Chacune de ces montres contient un mouvement à quartz qui était considéré comme une merveille technique à l’époque, avec seulement 51 pièces, soit un peu plus de la moitié du nombre requis par la plupart des mouvements à quartz.
Pour son 30e anniversaire en 2013, la marque a souhaité reproduire cette prouesse technique, mais avec une montre mécanique automatique tout aussi abordable. Les mouvements de montres mécaniques comptent environ 130 composants. En réponse au quartz, Swatch s’est lancée dans le développement d’une montre automatique qui ne comporterait que 51 pièces.
Il a fallu deux ans pour la mettre au point et cela a choqué toute l’industrie horlogère lorsqu’elle a été annoncée, non seulement parce qu’elle osait utiliser des pièces d’échappement en plastique, mais aussi parce qu’elle avait réussi à créer un mouvement de montre automatique ne comportant que 51 pièces et doté d’une réserve de marche de 90 heures (la norme à l’époque était d’environ 40 heures). De plus, sa précision revendiquée de plus ou moins 7 secondes par jour lui permettait d’obtenir le statut de chronomètre, un honneur utilisé à l’époque comme levier de marketing par des marques telles que Rolex, Omega et Breitling.
Automatique pour tous
Bien que moins connue que sa concurrente, Blancpain est considérée comme une marque de luxe supérieure à Omega dans les cercles horlogers. C’est pourquoi il est logique que Swatch utilise son mouvement automatique Sistem51 dans cette collaboration, plutôt que le quartz de la MoonSwatch. Les passionnés d’horlogerie préfèrent les mouvements mécaniques aux mouvements à quartz.
Ce qui est encore plus surprenant, c’est que Swatch semble vouloir répéter les tactiques de lancement douteuses qu’elle a utilisées pour la MoonSwatch l’année dernière. Le 26 mars, des scènes de pandémonium ont eu lieu dans le monde entier. À Londres, la manifestation de Carnaby Street a duré une demi-heure avant que la police ne soit appelée. À New York, des échauffourées ont éclaté à la suite de rumeurs d’agression à l’arme blanche dans la file d’attente. À Singapour, un magasin a été contraint de fermer ses portes pendant dix jours afin de laisser libre cours à l’agitation.
Malgré cela, Nick Hayek a confirmé que le déploiement au détail de la collaboration avec Blancpain serait exactement le même que celui de la MoonSwatch. Cette semaine, des valises jaunes sont apparues dans les vitrines des magasins Swatch du monde entier, où les montres seront mises en vente le 9 septembre.
L’utilisation de Bioceramic, l’alternative écoplastique brevetée de Swatch, un polymère fabriqué à partir d’huile de ricin et d’oxyde de zirconium, une substance céramique utilisée pour les boîtiers inrayables, robustes et hypoallergéniques dans l’horlogerie haut de gamme, est également à noter. Monsieur Hayek a déclaré à WIRED l’année dernière que la manipulation de ce matériau était de loin la partie la plus onéreuse du processus. Malgré des investissements dans de nouvelles machines d’extrusion de biocéramique, ainsi que dans des équipements de fabrication, des outils d’injection et des machines d’impression supplémentaires, Swatch a apparemment eu du mal à produire la MoonSwatch en quantités suffisantes pour répondre à la demande des consommateurs. Il reste à voir comment elle parviendra à répondre aux attentes de production de la MoonSwatch et à celles de la Scuba Fifty Fathom.
Il convient également de noter que, bien que l’empreinte carbone de la biocéramique soit inférieure à celle du plastique traditionnel, elle reste un polymère non biodégradable, susceptible de contribuer à long terme à la pollution plastique. S’il y a une certaine ironie autour d’un produit en plastique qui fait la promotion des merveilles de la vie marine, Swatch ne la voit manifestement pas, ou est au moins désireuse de la compenser : les montres sont toutes équipées de bracelets en tissu de style OTAN qui sont fabriqués à partir de plastique recyclé de l’océan.
Lorsque la Scuba Fifty Fathoms sera commercialisée dans les magasins Swatch ce samedi, les acheteurs impatients auront peut-être tiré des enseignements du lancement de la collaboration avec Omega et feront preuve d’un peu de patience. Il est possible qu’un certain temps doive s’écouler avant que la MoonSwatch de Blancpain ne soit largement disponible.
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